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marie dauguet

Ma lèvre est appuyée à la lèvre des dieux,
Tant s’épanche, invincible, envahissant les cieux,
Une odeur de baisers, d’étreintes et de spasmes.

Cette Muse ne contemple pas la nature, du haut de la colline : elle veut la toucher, et elle entre dans un champ de blé aux vagues hautes comme dans une mer, pour s’y baigner, nue.

Ôgrands blés pleins de vie où je suis enfouie,
Perdue en vos soupirs, vos spasmes, votre joie.

Alors c’est le désir de se perdre dans cette nature ou plutôt de s’abandonner à son rythme :

Ce plaisir formidable m’absorbe
De respirer d’accord avec les blés déments,
De rester là debout au bord du firmament
Avec mon âme ouverte, avec ma chair qui s’offre.

Marie Dauguet a repeuplé les bois de faunes et de nymphes :

J’inventerai des sons d’une telle tendresse
Que les daphnés vers moi tendront leurs souples bras ;
Que le vent conscient soudain me comprendra.