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rut âgé de vingt-huit ans, ayant publié les Chants de Maldoror et des Poésies, recueil de pensées et de notes critiques d’une littérature moins exaspérée et même, çà et là, trop sage. On ne sait rien de sa vie brève ; il ne semble avoir eu aucunes relations littéraires, les nombreux amis apostrophés en ses dédicaces portant des noms demeurés occultes.

Les Chants de Maldoror sont un long poème en prose dont les six premiers chants seuls furent écrits. Il est probable que Lautréamont, même vivant, ne l’eût pas continué. On sent, à mesure que s’achève la lecture du volume, que la conscience s’en va, s’en va, — et quand elle lui est revenue, quelques mois avant de mourir, il rédige les Poésies, où, parmi de très curieux passages, se révèle l’état d’esprit d’un moribond qui répète, en les défigurant dans la fièvre, ses plus lointains souvenirs, c’est-à-dire pour cet enfant les enseignements de ses professeurs !

Motif de plus que ces chants surprennent. Ce fut un magnifique coup de génie, presque inexplicable. Unique ce livre le demeurera, et dès maintenant il reste acquis à la liste des œuvres