Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/76

Cette page a été validée par deux contributeurs.

secret de ces deux âmes également nobles : celle de la grand’mère et celle de l’enfant. Et il eut une vive joie ; tout à coup, il entrevit la possibilité d’un peu de bonheur pour cette vaillante jeune fille. Il reprit ému.

« Il faut accepter, Michelle, vous êtes très jeune, mais dans les circonstances où vous vous trouvez, bien des difficultés doivent être écartées. Cet homme qui vous demande, sait-il votre situation ?

— Absolument.

— Alors c’est un cœur désintéressé et maintenant pourvu qu’il soit bon chrétien, je ne vois plus d’obstacles.

— Hélas, Monsieur le curé, il est protestant.

— Protestant ! Ah ! quelle fatalité !

— Vous pensez que je ne puis pas l’épouser ?

— J’hésite.

— Vous hésitez seulement… si je refuse cette union, c’est la ruine des espérances de ma mère. Vous savez à quel point ma pauvre maman a besoin d’aisance, sa raison est si chancelante ! Ah ! si je pouvais travailler, gagner…

— Que pense votre grand’mère ?

— Je ne lui ai pas encore parlé de ce différend. Voyez-la, Monsieur le curé. Mais il me vient une pensée : si Dieu aidant, je pouvais convertir mon mari ?

— Ce serait une grande miséricorde de la part du Très-Haut que de vous donner cette gloire, Michelle ; mais vous aurez peine peut-être, à accomplir vos devoirs et si jamais vous veniez à oublier votre foi…

— Oh ! je mourrais plutôt mille fois ! et la Sainte Vierge que j’ai tant priée ne m’abandonnerait pas à ce point. Ce matin, j’ai mis mon mariage sous sa protection. Non, ceci ne saurait être à craindre, Monsieur le curé.