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Frida était rose et blanche, grasse et plantureuse, une riche nature pas nerveuse, placide ; mais, à vivre près de sa tante, elle avait pris son entêtement, sa décision, et, sous son enveloppe d’apparence bénévole, se cachait une ferme volonté.

Wilhem était le préféré d’Edvig. Elle était, à juste titre, fière de lui. Il représentait dignement le chef d’une grande famille, étant resté toujours plus sérieux que son âge.

Quand, au bout d’une soirée silencieuse pour les deux belles-sœurs, l’Allemande se retira, Michelle retint ses enfants un instant dans sa chambre.

« Restez un peu, mes chers petits, dit-elle ainsi que jadis elle parlait aux bébés.

— Tu vas au-devant de mes désirs, mère, dit Frida, je voulais te parler d’une chose qui me tient au cœur. Je voudrais me marier pour avoir un intérieur plus gai. Parmi mes amies, déjà plusieurs sont installées pour vivre leur vie. Je n’ai pas les raisons de Wilhem pour renoncer au mariage.

— Pourquoi Wilhem y renoncerait-il ?

— Parce que mère, vois-tu, répondit Wilhem, tante Edvig ou ma femme souffriraient d’un contact l’une avec l’autre, ce serait le renouvellement de ce que j’ai vu jadis pour toi. Les larmes, les coups d’épingles, et moi entre deux êtres aimés, ne voulant affliger ni l’un ni l’autre… Rantzein m’appartient, mais ma pauvre tante, malade, en est de fait l’unique maîtresse ; jamais je ne lui causerai la grosse peine de s’y voir au second rang.

— Mais, mon enfant, tu peux vivre en ville. N’attends pas pour t’établir, ainsi que ton père l’a fait, l’âge où l’on part trop vite pour voir grandir sa famille.

— Je t’ai dit mes raisons, mère, tu dois