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rire ; je vais vous laisser mes clés ; si toutefois mon séjour se prolongeait, je vous enverrais un petit mot pour demander des vêtements.

— N’allez pas nous lâcher, au moins. »

Les deux femmes se serrèrent les mains. La blanchisseuse embrassa Henri, et François courut chez l’abbé Rozel.

Le voyage se fit d’une traite sans encombre. À la gare de Rantzein, un coupé attendait les voyageurs. Le cocher et le valet de pied étaient inconnus de la comtesse et de son fils.

Le trajet très court fut accompli en quelques minutes, pendant lesquelles le cœur des deux fugitifs, qu’avaient été la mère et le fils, battait à se rompre. Cette route, ils la connaissaient.

Cette grille du château maintenant s’ouvrait devant eux.

La voiture s’arrêta au perron.

La comtesse Hartfeld eut peine à monter l’escalier, tant ses jambes tremblaient. Frida et son institutrice se tenaient sur le haut des marches. Michelle voulut saisir sa fille dans ses bras, l’embrasser, mais la petite effarouchée se sauva à toutes jambes.

« Mon fils Wilhem ? balbutia l’arrivante.

M. Wilhem est au collège, Madame, répondit l’institutrice, mais Mlle Hartfeld vous attend dans son appartement. Elle est trop souffrante pour descendre. Je vais vous y conduire.

— C’est inutile, je le connais. »

Elle monta, toujours suivie d’Henri, tout désorienté, tout surpris, ayant difficulté à reprendre contact avec les choses. Michelle frappa à la porte de sa belle-sœur.

Herein[1], dit la voix rude de l’Allemande.

Michelle entra.

La vieille Edvig était sur une chaise longue ; elle tendit les bras à son neveu qui, ému,

  1. Entrez.