Page:Gouraud - Dieu et patrie, paru dans La Croix, 1897.djvu/308

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Michelle, pressée de questions par Madame Pierre, avait seulement répondu qu’elle était veuve et peu fortunée.

Ces deux choses étaient visibles. Seulement, un jour, elle resta mal à l’aise, ne voulant pas froisser la bonne créature, ni cependant accepter si grande familiarité.

« Madame, était venue dire la blanchisseuse, c’est dimanche, faut venir prendre le café avec nous.

— Je suis trop en deuil, répondit Michelle, polie.

— Nous sommes en famille. Les ouvrières ne viennent pas aujourd’hui, c’est la morte saison.

— Merci, je ne sors jamais, au moins pendant un an ; après, nous verrons.

— À votre aise, Madame, c’était de si bon cœur, faut pas vous faire de la misère toute seule, la vie en donne bien assez, vous ne ressusciterez pas votre homme avec des larmes. Si vous étiez raisonnable, au lieu de vous user le tempérament à vous faire de la bile, vous viendriez avec nous à la foire de Neuilly.

— Merci, fit doucement Michelle très lasse, j’attends quelqu’un.

— Voulez-vous que nous emmenions Henri avec nous ?

— Non, répondit vivement la comtesse, allez vous promener, je vous en prie, n’insistez plus. »

La blanchisseuse se retira un peu froissée, grommelant :

« Elle est tout de même bégueule, la voisine. »

« Une lettre pour vous, Madame Hartfeld, cria le concierge du seuil de sa loge. Familier avec ses locataires, il ne se dérangeait