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Et moult est fouls qui tant aimme son cors qu’il en oublie a sauver s’ame que Diex li presta pour ravoir la arrieres ; et il fet[1] tant que maufez[2] l’a par son pechié. Cil qui ce fait[3], si fait autresi comme li mauvais serjanz a cui li sires bailla ses besanz pour monteploier en bien. Mais il ne le fist mie bien, comme cil qui estoit de male [F° 38 a] foi. Dont li sires le chaça ensus de lui. Nonques puis n’ot que honte et reprouche, si comme l’evangile le nous raconte[a]. Tout ausi[4] sera il de ceuls qui laissent le grain pour la paille. Ce sont cil[5] qui laissent leur ames perir pour le delit de leur cors, dont touz les maus[6] leur viennent.
Mais atant se taist ici endroit[7] li contes[8] des ·vii· arz et de nature, pour deviser la faiture du monde, comment il est par nature faiz et pourtraiz[9] de Dieu qui [F° 38 b] par son saint commandement fist le monde, et tout ce qui i apent. Et tout fait fu[10] a sa volenté et a son devis. Or oiez ce que nous vous en dirons[11].

  1. — B : fait.
  2. — B : mauffez.
  3. — B : qui fait ce.
  4. — A : tout aut ausi ; B : aussi.
  5. — B : ceuls.
  6. — B : mauls.
  7. — B : « endroit » manque.
  8. — B : le conte.
  9. — B : portrait.
  10. — B : fu fait.
  11. — B : devisserons.
  1. « Cil qui ce fait... nous raconte. » St Luc XIX, 12 ; St Matthieu XV. 14.


ix [a].
De la fourme du firmament.

Diex forma[1] le monde tout reont, autresi comme est une pelote qui est toute reonde, et le ciel tout reont qui environne la terre de toutes parz entierement sanz nulle defaute, tout ensement comme l’escaille de l’oef qui environne l’aubun[2] tout [F° 38 c] entour. Et ausi[3] li ciels avironne[4] ·i· air qui est seur[5] celui air, qui a non hester en latin[* 1] ; c’est autretant a dire comme pur air et net[b], car il fu faiz de nesteé et de pure purté

Cil airs s’i resjouist nuit et jour de resplendeur perpetuel ; et est si clers et reluisanz[6] que, se uns hons estoit demouranz[7] la, il verroit tout, et unes choses et autres, quanqu’il y avroit, de l’un des chiés jusques a l’autre, ausi legierement, ou plus, comme uns [F° 38 d] hons feroit ça jus a terre devant ses ieulz un seul pié loing de lui, ou mains enquore[8], s’il en avoit mestier. Tout autressi[9] vous di, qui la seroit il porroit veoir tout entour[10] ausi bien de loing comme de près, tant est cil airs et clers et nez[11].

  1. — B : fourma.
  2. — B : l’aubunt.
  3. — B : aussi.
  4. — B : environne.
  5. — B : sur.
  6. — B : et si reluisanz.
  7. — B : demoranz.
  8. — B : encore.
  9. — B : autresi.
  10. — A : encor.
  11. — B : naiz.
  1. * « Et ausi... latin » : Et le ciel environne un air, appelé éther en latin, qui est au-dessus de l’air terrestre (celui air).

    La leçon de la rédaction en vers est plus simple et plus claire :

    Sloan f° 90 c :

    Tot ensi li cieus avirone
    un air qui est desous cest air
    qui en latin a non ether,
    c’est a dire purs airs et nès.

  1. [F° 38 b — 39 d = Vers 1620-1697.]
  2. « Diex forma... air et net. » Sydrach Ad., 121, S 118 ; Neckam I. 3 ; De Laud. 5.