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En mer s’esqueult[1] et s’espant par les fluns, et vait sourdant par la terre de lieu en autre, et par vainnes. [F° 79 b] Tout ausi comme li sans de l’oume[2] s’en vait par les vainnes du cors et s’en ist[3] hors par aucun lieu, tout ausi court l’yaue par les vainnes de la terre, et s’en sourt hors par les fontainnes[4][a]. Dont il avient partout que, quant l’en chieve terre[5] loing ou près, soit en montaingne ou en valée, l’en trueve yaue, ou salée ou douce, ou d’autre maniere.

  1. — B : s’eskeult.
  2. — B : l’omme.
  3. — B : vait.
  4. — B : sourt par les fontainnes hors.
  5. — B : la terre ; A : chieve teree.
  1. « En mer s’esqueult... les fontainnes. » Honorius Aug. I. 5. Sydrach S. 131, 152.


x[a].
Comment l’yaue douce et salée, noire, chaude[1] et envenimée sourt.

[F° 79 c] Toutes yaues viennent de mer[2] ; et les douces et les salées, queles qu’eles[3] soient, toutes viennent de la mer et la s’en revont toutes. Dont aucuns porroit demander : « Puis que eles viennent toutes de la mer, comment ce est que yaue douce en vient ? » À ce respont ·i· des aucteurs[4], que l’yaue qui a son cours par la douce terre est douce ; et devient douce par la douceur de la terre qui li tolt[5] s’amertume par la na-[F° 79 d]ture de li. Car l’yaue qui est salée et amere, quant ele court par la douce terre, la douceur de la terre retient s’amertume et sa saleüre. Et ainsi devient douce l’yaue qui est salée et amere[b].

Autres yaues sourdent ameres et noires, que aucunes genz boivent pour guerir en lieu de poisons[6]. Et font moult granz purgations a aucunes genz souventes foiz. C’est une yaue qui sourt noire et clere ; si court par terre qui est amere et noire ; [F° 80 a] et est plainne de porreture moult grant. Si est merveilles que est sainne.

En autre lieu court[7] yaue chaude, si que l’en s’i eschauderoit bien, que l’en apele naturels bains[c]. S’en[8] a ·i· a Ais la Chapele ; et a Plommieres l’abaye[9], qui est en Loheraine, ·i·[10] autre ; et a Ais en Gascoingne ·i· autre. Car dedenz terre a maintes cavernes qui sont chaudes et ardanz comme feu. Et la terre a maintes vainnes qui sont toutes plainnes de sou-[F° 80 b] fre[11]. Si en vient aucunes foiz ·i· vent grant et fort qui s’ent[12] vient par l’yaue qui en sort[13]. Et se deboutent si forment que li souffres en esprant

  1. — B : et chaude.
  2. — B : la mer.
  3. — B : que eles.
  4. — S : À ce vous respont Aristote et Platon...
  5. — B : qui li toust.
  6. — B : poissons.
  7. — B : sourt.
  8. — B : naturaus bains. Si en...
  9. — B : Ploumieres l’abeie...
  10. — Loherainne, en a ·i· ...
  11. — B : sueffre.
  12. — B : s’en
  13. — B : sourt.
  1. [F° 79 b80 d = Vers 3508-3571.]
  2. « À ce respont... salée et amere. » Bède. De natura rerum 41 (Patrol. t. 90, col. 261. Paris, 1850) ; Honorius Aug. I. 46.
  3. « Autres yaues... naturels bains. » Honorius A. I. 48. Solin 4 et 5.