Page:Gossuin - L’Image du monde, édition Prior, 1913.djvu/127

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 119 —

Si ra en cele region maismes[1][* 1] une autre maniere de serpanz[2] qui ont cornes de mouton[a] ; une autre en y a qui a non aspis, qui ne puet estre pris ne enchantez, se n’est par douz chant ; car il en ot trop volentiers le son. Mais quant il ot le chant premierement, si boute sa keue en ses oreilles, qu’il ne l’oie[3], et se [F° 59 a] trait ensus du chant pour ce qu’il ne[4] soit deceüz[b].

Autres serpanz y a qui ont non tygris, que l’en prent touz vis a force d’engins. Et de ceuls fait l’en le triacle qui desfait et oste autre venin[c].

Si ra[5] une maniere de vers qui ont ·ii· bras[6] si lons et si divers que il abatent les olifanz[7] et tuent[d]. Cil serpenz[8] vit moult longuement. Et quant il est vieill et il se sent floibe[9][* 2], si se confont per geunner[10], et se laisse a-[F° 59 b]famer[11] si durement que pou li remaint de son cors. Et puis se met parmi ·i· pertuis d’aucune pierre hors[12] moult estroit. Lors se met hors si a grant destrece[13] que sa pel i remaint toute entiere. Et puis li revient arreres une autre pel. Et ainsi reforme[14] son aage comme sage beste qu’ele est[15][e].

Serpanz i ra assez d’autre maniere qui ont maintes[16] precieuses pierres [17] es testes et es ieulz, qui font maintes granz vertuz, qui les porte [F° 59 c] sus soi[18] et les peut[19] avoir[f].

Or vous[20] deviserons de[21] pierres qui la croissent et qui i sont.

  1. * « maismes » : En angn. ai pour ei est très commun (cf. Suchier, Altfr. Gr. p. 20, 28, 49) surtout devant le s. Ce changement est rendu d’autant plus probable ici que, pour le scribe de A, meïsmes était évidemment dyssyllabe : il l’épelle plus loin (f° 60 d) « mesmes. »
  2. * Les exemples de la conservation du premier l de flebilis sont nombreux et justifient l’orthographe du ms. A. Cf. aussi f° 113 a ; cf. Burguy t. III, p. 166.
  1. « Si ra en cele... mouton. » Solin 27 ; Isidore, Etym. XII. 4. 18 ; Jacques de Vitry 89.
  2. « Une autre... deceüz. » Isidore, Etym. XII. 4. 15 ; Neckam II. 114, De Laud. IX. 289 ; Jacques de Vitry 89.
  3. « Autres serpanz... venin. » Neckam II. 108 ; Jacques de Vitry 89.
  4. « Si ra une maniere... tuent. » Solin 52 ; Isidore, Etym. XII. 4. 5, 4. 46 ; Honorius Aug. I. 13 ; Jacques de Vitry 89.
  5. « Cil serpenz... beste qu’ele est. » Isidore, Etym. XII. 4. 5, 4. 46 ; Jacques de Vitry 89.
  6. « Serpanz i ra... les peut avoir. » Solin 30 ; Neckam II. 146 ; Jacques de Vitry 89.
  1. — B : msmes.
  2. — B : serpans.
  3. — B : oye.
  4. — B : ce qui ne.
  5. — B : venim. Si i ra.
  6. — B : braz.
  7. — B : olyfanz.
  8. — B : serpanz.
  9. — A : floibe ; B : fieble ; C : foible.
  10. — B : par geuner (« per » cf. note p. 66).
  11. — B : affamer.
  12. — B : hors d’aucune pierre.
  13. — B : a si grant destreice.
  14. — B : refourme.
  15. — B : quel est.
  16. — A : mātes ; B : mainte (l’orthographe ordinaire de A est maintes ; « mantes » ne se présente pas dans le texte ; nous résolvons l’abréviation ā par ain dans ce cas-ci).
  17. — B : precieuse pierre.
  18. — B : « sus soi » manque.
  19. — C : peüst.
  20. — A : Or vons.
  21. — B : des.