Page:Gontcharoff - Oblomoff, scènes de la vie russe, trad Artamoff, 1877.djvu/304

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
290
OBLOMOFF.

quais, défenseur du système des injures, tous éclatèrent de rire.

— Riez, riez, je le dirai à mon barine ! sifflait Zakhare.

— Et toi, dit-il en s’adressant au portier : tu devrais faire taire ces brigands, au lieu de rire. Pourquoi es-tu là ? Pour maintenir l’ordre ! Et que fais-tu ? Attends donc, je le dirai au barine. Attends, tu auras ton compte !

— Allons, assez, assez, monsieur Zakhare ! dit le portier, en cherchant à l’apaiser ; que t’a-t-il fait ?

— Comment ose-t-il parler ainsi de mon barine ? répliqua Zakhare avec chaleur, en montrant le cocher. Sait-il donc ce que c’est que mon barine ? demanda-t-il d’un ton de vénération. Mais toi, dit-il en s’adressant au cocher, tu ne pourras jamais en avoir un pareil, même en rêve : bon, sage, beau garçon ! Le tien n’est qu’une rosse affamée ! C’est honteux à voir, quand vous sortez sur votre jument bai-brun : de vrais mendiants ! Et vous ne mangez que des radis noirs avec du kwas. Tiens, ton vilain carrick, on pourrait en compter les trous !…

Il est bon de remarquer que le carrick du cocher n’était nullement troué.

— Je n’en ai pas encore un pareil ! interrompit le cocher, en tirant d’une main leste le bout de la chemise qui passait sous l’aisselle de Zakhare.