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OBLOMOFF.

— Est-ce qu’il te dit des sottises, dis donc, hé ? demanda un cocher.

— S’il m’en dit ! Je ne sais comment Dieu me donne seulement la force de les supporter !

— Eh bien ! Quoi donc ? C’est un bon barine, puisqu’il se borne à des sottises ! dit d’un voix lente un laquais en ouvrant une tabatière ronde qui criait. Toutes les mains, excepté celles de Zakhare, s’allongèrent vers la tabatière. On commença à priser, à éternuer et à cracher en chœur.

— S’il dit des sottises, tant mieux, continua celui-ci, plus il en dit, mieux ça vaut : au moins il ne vous tape pas, s’il dit des sottises. Avant d’être ici je servais un individu : on n’avait pas encore eu le temps de savoir pourquoi, que déjà il vous tenait par les cheveux.

Zakhare attendit d’un air de mépris que celui-ci eût terminé sa tirade et, s’adressant au cocher, il continua :

— Il abreuve un homme d’ignominie, sans qu’on sache pourquoi : ça lui est égal.

— Il est probablement difficile à contenter ? demanda le cocher.

— Je crois bien, murmura Zakhare de sa voix enrouée, en fermant les jeux d’un air significatif, si difficile que c’est affreux ! Ce n’est pas ainsi, ce n’est pas cela ; et on ne sait pas servir, on ne sait rien pré-