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OBLOMOFF.

— Eh ! toi, où l’as-tu prise ? demanda-t-il au paysan, qui te l’a donnée ?

— Mais à l’auberge, où je me suis arrêté dans la ville, entends-tu, répondit le mougik. On est venu deux fois de la posse demander s’il n’y avait point de mougiks d’Oblomofka : il y a-t-une lettre pour le barine, entends-tu ?

— Eh bien ?

— Eh bien ! tout d’abord je me suis caché ; le soldat s’en est allé avec la lettre, donc. Mais le sacristain de Verkliovo m’avait vu, et il l’a dit. On vint une deuxième fois. La deuxième fois qu’on vint, on commença à gronder beaucoup, et on remit la lettre ; on me fit même payer cinq kopeks. J’ai demandé ce qu’il y avait à faire, entendez-vous, avec la lettre, où la fourrer ? On a ordonné de la remettre à Votre Grâce.

— Tu n’aurais pas du la prendre, fit observer avec colère la dame de la maison.

— Eh ! je ne voulais pas la prendre. Pourquoi, entendez-vous, avons-nous besoin de la lettre ? nous n’en avons pas besoin. On ne nous a pas commandé, entendez-vous, de prendre de lettres, j’ose pas ; allez-vous-en avec votre lettre ! Mais le soldat commença à jurer trop fortement ; il voulait se plaindre aux autorités, et je l’ai prise.

— Imbécile ! dit la maîtresse de la maison.