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OBLOMOFF.

Et il semble qu’il n’ait plus la force de sortir du bois sauvage pour regagner le vrai sentier… La forêt l’entoure de toutes parts et tout dans son âme devient plus épais et plus obscur. Les broussailles lui dérobent de plus en plus le sentier ; la conscience nette de lui-même s’éveille de plus en plus rare et ne ranime que pour un moment ses forces engourdies.

L’intelligence et la volonté sont depuis longtemps paralysées et, tout le fait croire, paralysées sans retour. Les événements de sa vie se sont amoindris jusqu’à prendre des proportions microscopiques, et ces événements mêmes, il ne peut les dominer ; il ne passe pas de celui-ci à celui-là, mais il est par eux ballotté comme d’une vague à l’autre ; il n’a plus la force d’opposer à l’un d’eux le ressort de sa volonté, ou de se laisser aller avec prudence à l’impulsion d’un autre.

Il ressentit une vive amertume de cette secrète confession qu’il se faisait à lui-même. Les regrets stériles du passé, les remords brûlants de sa conscience le poignaient comme des épines, et il réunit toutes ses forces pour jeter à bas le fardeau de ces reproches, trouver un autre coupable et retourner leurs aiguillons contre celui-là. Mais qui ?

« C’est Zakhare ! » dit-il à voix basse… Il se retraça les détails de la scène avec Zakhare et sa figure rougit de la flamme de la honte. « Si quelqu’un par