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Gobe-la-lune ! ― Le surnom de cette prostituée d’un certain âge qui n’avait pas de nom, proclamait sa faiblesse d’esprit. L’exploitation à tout jamais consentie de son corps par une autre dénote, chez une femme, une absence de défense dans la bataille des intérêts. La femme qui a un peu de vice s’émancipe, tôt ou tard, de la tutelle d’une maîtresse de maison, et travaille pour son compte. La femme qui ne sait pas sortir du lupanar est toujours un être inintelligent. Les médecins, qui ont la pratique de ces femmes, vous peignent l’interrogation stupide de leurs yeux étonnés, de leurs bouches entrouvertes, à la moindre parole qui les sort du cercle étroit de leurs pensées. Ils vous les montrent vivant dans un nombre si restreint de sentiments et de notions des choses, que leur état intellectuel avoisine presque le degré inférieur qui fait appeler un être humain : un innocent. Eh bien, parmi les basses intelligences de la maison, Gobe-la-lune était encore