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l’art japonais.

M. Gillot. C’est une série de ces étourdissants lavis à l’encre de Chine, sabrés de gouache, parmi lesquels est un danseur, à la tête baissée que masque son chapeau, aux mains tressautantes au bout de ses bras tendus dans l’espace, un pied levé devant lui, à la hauteur de la poitrine, dans le plus savant raccourci : le danseur le plus extraordinairement dansant, qui se puisse voir. Puis à côté de ces œuvres à l’encre de Chine, des aquarelles de premier coup, grandes ou petites, d’un faire inimitable, comme ce papillon bleu, dont les ailes ont l’air d’être faites avec l’azur qui habille les papillons du Brésil, et une grappe de raisin, le safranement de l’automne, est en germe dans l’encre de Chine des feuilles, et où les grains de la grappe semblent des bulles de cristal, contenant l’eau bleuâtre du raisin noir, et des tortues qui ont cette couleur qui leur est propre, la couleur de la patine de vieux bronzes. Et au milieu de ces petits chefs-d’œuvre, semés sur les feuillets qu’on retourne, une grande grue qui mériterait d’être encadrée, une grue lavée de teintes verdâtres et bleuâtres, impossibles à décrire dans leur charme harmonique, — et cet au-delà de la couleur, qui met un peu du rêve dans une reproduction, par la peinture, d’un être.