Page:Goldenweiser - Le Crime comme peine, la peine comme crime.djvu/51

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tenait par de pareilles manipulations ; mais ce qui nous frappe surtout c’est que les hommes d’alors se contentaient d’établir la culpabilité de l’accusé sans se préoccuper le moins du monde des motifs qui l’avaient poussé à commettre son crime, et comment sans se poser cette question, s’octroyaient-ils le droit d’envoyer leurs semblables aux tortures et même à la mort. Ce sont les mêmes circonstances et au même degré qui frappent Tolstoï dans le tribunal criminel moderne.

Tolstoï, comme Bellami dans son « Looking backward » regarde le présent avec les yeux de l’avenir et le voit non pas fantastiquement, mais vif, réel comme nous ne pouvons voir que les tableaux d’un passé lointain se reproduisant à nos regards. Pour lui le crime a complètement cessé d’être le résultat de la mauvaise volonté d’un seul individu, il se décompose entièrement en parties intégrantes provenant du mauvais exemple de l’entourage, du peu de sollicitude envers son prochain, de la cupidité et de l’égoïsme qui trouvent leur base dans l’ordre économique actuel.

« Il est évident — pensait Nekludoff, au sujet du jugement d’un gamin qui avait volé de vieilles nattes — que ce garçon n’est pas un malfaiteur à part mais, comme on le voit, un individu des plus ordinaires et s’il est devenu ce qu’il est c’est seulement grâce à ce qu’il se trouvait dans des conditions qui engendrent de tels individus. C’est pourquoi il paraît évident, qu’afin qu’il n’y ait plus de ces gamins, il faudrait tâcher de