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152 LE MARIAGE

Arina Panteleïmonovna. — Ne discute pas, Agaphia Tikhonovna... une chevelure aussi blonde... et il n'y a pas d'autre roi de trèfle...

Agaphia Tikhonovna. — Pardon... le roi de trèfle ici veut dire noble... il y a de la marge d'un marchand au roi de trèfle...

Arina Panteleïmonovna. — Eh ! Agaphia Thiko- novna, tu ne parlerais pas ainsi si notre cher défunt Tikhone, ton père, Panteleïmonovitch, était encore de ce monde... Il lui arrivait de frapper la table de toute la force de sa main et de ses cinq doigts et de crier : « Tel que je suis, je crache sur celui qui a honte d'être un marchand... jamais je ne donnerais ma fille à un colonel... Je laisse ça aux autres... Quant à mon fils, ajoutait le défunt, il ne fera jamais son service... Hein? est-ce qu'un marchand ne sert pas son empe- reur aussi bien que n'importe qui?... » Et il écrasait presque la table avec ses cinq doigts... Sa main, même son bras... je n'en connaissais pas de pareil ! Quelle force, quelles passions... A vrai dire, je suis sûre que c'est à cause de lui... que ta mère a passé si vite de la vie au trépas... la malheureuse aurait vécu plus longtemps...

Agaphia Tikhonovna. — Il ne manquerait plus que ça... de me voir affublée d'un mari aussi cruel. Jamais je n'épouserai un marchand...

Arina Panteleïmonovna. — Mais Alexeï Dimi- trievitch Starikof n'est pas comme ça...

Agaphia Tikhonovna. — Inutile, je ne le veux pas... Il a une barbe... quand il mangera, tout lui coulera dessus... Non, non, je ne le veux pas.

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