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mystérieuses que nous creusons après de longues et graves méditations. Bientôt les nobles témoins qui tiennent de nous faire l’honneur de descendre ici avec nous pour voir poser la première pierre, remonteront sur la surface de la terre. Bientôt ils seront remplacés dans ces galeries souterraines par des pierres cimentées, qui en rendront l’entrée impossible.

« Cette pierre fondamentale dont les angles réguliers indiquent la régularité du bâtiment, et dont la position perpendiculaire doit faire pressentir quel sera l’aplomb des murailles et l’équilibre parfait de l’ensemble de l’édifice, nous pourrions nous borner à la poser sur le sol, ainsi que toutes celles qui vont la suivre. Leur surface polie et uniforme et leur pesanteur suffiraient pour les consolider, et cependant nous ne leur refuserons pas la chaux qui les unira plus étroitement encore. C’est ainsi que les époux que l’amour a rapprochés deviennent inséparables quand la loi a cimenté les liens du cœur.

« Il est peu agréable de rester oisifs au milieu de travailleurs ardents ; nous espérons donc que vous ne nous refuserez pas l’honneur de travailler avec nous. »

A ces mots il présenta à Charlotte sa truelle remplie de chaux mêlée de sable, et lui fit signe d’étendre ce mélange sous la pierre ; ce qu’elle exécuta avec autant de grâce que d’adresse. Le Baron, le Capitaine, Ottilie et une partie des invités se prêtèrent avec la même bonne volonté à cette cérémonie. La pierre tomba sur la couche de chaux ; le maçon présenta le marteau à Charlotte et la pria d’annoncer, par trois coups vigoureusement frappés, l’union inséparable de la pierre avec le sol qui portera la construction nouvelle. Cette formalité remplie, le maçon reprit son discours.