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n’était qu’une attention par laquelle ou se proposait de surprendre agréablement le maître que, sans doute, on attendait sous peu. Ranimée par cette pensée, elle se promit d’offrir à son ami un établissement d’utilité de son invention.

L’embellissement du village, ainsi que le Capitaine l’avait prévu, avait inspiré à tous les habitants l’amour de la propreté, de l’ordre et du travail. Ce fut ce penchant qu’Ottilie se proposa de développer chez les petites filles. A cet effet, elle les réunit au château à des heures fixes, et leur enseigna à filer, à coudre et d’autres travaux analogues à leur sexe. On ne saurait enrégimenter les petites Elles comme les petits garçons. Ottilie le sentit, aussi ne leur imposa-t-elle aucune uniformité de costume ou de mouvement, mais elle s’efforça d’augmenter leur activité et de les rendre plus attachées à leurs familles, plus utiles dans leurs maisons. Chez une seule de ses élèves, la plus vive et la plus éveillée de toutes, ses conseils ne produisirent pas le résultat qu’elle en avait attendu. La petite espiègle se détacha entièrement de ses parents, pour ne plus vivre que pour sa belle et bonne maîtresse.

Comment Ottilie aurait-elle pu rester insensible à tant d’affection ? Bientôt la petite Nanny, qu’elle avait tolérée d’abord, devint sa compagne inséparable, et, par conséquent, commensale du château. Sans cesse à ses côtés, elle aimait surtout à la suivre dans les jardins, où la petite gourmande se régalait avec les cerises et les fraises tardives dont le Baron avait su se procurer les espèces les plus rares. Les arbres fruitiers, qui promettaient pour l’automne une riche récolte, fournissaient au jardinier l’occasion de parler de son maître dont il désirait le prochain retour. Ottilie l’écoutait