Page:Goethe - Les Affinités électives, Charpentier, 1844.djvu/108

Cette page n’a pas encore été corrigée

dans l’embrasure d’une fenêtre. Les deux dames entièrement abandonnées à elles-mêmes, se promenaient l’une à côté de l’autre dans la salle, mais en silence ; la pensée de Charlotte était près du Capitaine, et la Baronne rêvait au moyen de faire partir Ottilie le plus tôt possible.

L’isolement des deux dames finit par être remarqué par les autres membres de la société, ce qui les embarrassa péniblement. Aussi ne tarda-t-on pas à se retirer, les dames dans l’aile gauche, et les hommes dans l’aile droite du château. Les plaisirs comme les inquiétudes de la journée paraissaient terminés.


Édouard avait accompagné le Comte dans sa chambre, et comme ni l’un ni l’autre n’avaient envie de dormir, ils se laissèrent aller à une conversation intime, dans laquelle ils se rappelèrent mutuellement diverses aventures de leur première jeunesse. La beauté de Charlotte occupa de droit la place d’honneur dans ces souvenirs, le Comte en parla en connaisseur enthousiaste.

— Oui, dit-il après avoir posé méthodiquement toutes les conditions de la beauté, ta belle maîtresse les réunissait toutes. Une seule est restée intacte, celle-là brave toujours le temps, je veux parler du pied. J’ai remarqué aujourd’hui celui de Charlotte lorsqu’elle marchait devant moi, et je l’ai retrouvé aussi parfait qu’il y a dix ans. Convenons-en, cet usage, des Sarmates qui, pour honorer leurs belles, leur prenaient un soulier