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vages et leurs mœurs, telles que nous les retracent les voyageurs des nouveaux mondes, car on ne peut nier que les Européens, comme les Asiatiques,ne soient déjà représentés dans les poèmes homériques à un haut degré de culture, plus haut peut-être que celui dont on jouissait aux temps de la guerre de Troie ; mais cette maxime était d’accord avec, le culte de la nature, alors dominant, et, dans ce sens, nous pouvions l’admettre.

Au milieu de toutes ces occupations, qui se rapportaient à l’étude de l’homme dans un sens élevé, tout comme à la poésie dans le sens le plus intime et le plus aimable, j’étais pourtant forcé de m’apercevoir chaque jour que je me trouvais à Wetzlar. A chaque heure, la conversation revenait sur l’état de l’inspection, sur les obstacles toujours croissants qu’elle rencontrait, sur la découverte de nouvelles malversations. Je voyais encore le saint Empire romain rassemblé, non pas pour de simples solennités extérieures, mais pour une affaire qui pénétrait dans les dernières profondeurs. Toutefois je dus me rappeler encore le jour du couronnement et cette salle à manger à moitié vide, où les convives invités ne parurent pas, parce qu’ils étaient de trop grands personnages. Ils s’étaient rendus à Wetzlar, mais on dut reconnaître des symptômes plus fâcheux encore. L’incohérence de l’ensemble, l’opposition des parties, ne cessaient pas de se révéler, et l’on savait fort bien que des princes s’étaient dit en confidence les uns aux autres, qu’il fallait voir si l’on ne pourrait pas, à cette occasion, enlever au chef quelque prérogative.

Quelle fâcheuse impression le minutieux récit de toutes les négligences, les injustices et les corruptions, devait produire sur un jeune homme qui voulait le bien et qui s’efforçait d’y former son cœur, tous les gens honnêtes le sentiront. De quelle source naîtra, dans de pareilles circonstances, le respect de la loi et du juge ? Mais, lors même qu’on aurait attendu avec la plus grande confiance les effets de l’inspection ; qu’on aurait pu croire qu’elle remplirait entièrement sa haute destination, il n’y avait rien là de salutaire pour un jeune homme qui marchait en avant d’un cœur joyeux. En elles-mêmes, les formalités de ce procès tendaient toutes à.traîner le temps en longueur. Voulait-on déployer quelque action et produire quelque effet, il