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clarai sur-le-champ. « Vous prétendez, poursuivit-il, ne pas connaître ces gens, et cependant vous avez eu avec eux de fréquentes réunions. — Pas la moindre, car, ainsi que je l’ai dit, excepté le premier, je n’en connais pas un, et, celui-là même, je ne l’ai jamais vu dans une maison. — N’êtes-vous pas allé souvent dans la rue *** ? — Jamais. » Cela n’était pas entièrement conforme à la vérité. J’avais accompagné une fois Pylade chez sa bien-aimée, qui demeurait dans cette rue : mais nous étions entrés par la porte de derrière et restés dans le jardin. C’est pourquoi je crus pouvoir me permettre ce subterfuge, que je n’avais pas été dans la rue même. Le bon homme me fît encore beaucoup de questions, auxquelles je pus toujours répondre négativement, rien de ce qu’il voulait savoir ne m’étant connu.

A la fin, il parut se fâcher, et il dit : « Vous récompensez bien mal ma confiance et ma bonne volonté. Je viens pour vous sauver. Vous ne pouvez nier d’avoir composé des lettres et fait des écritures pour ces gens eux-mêmes ou pour leurs complices, et de les avoir aidés de la sorte dans leurs mauvais coups. Je viens pour vous sauver ; car il ne s’agit de rien moins que de fausses écritures, de faux testaments, de billets supposés et autres choses pareilles. Je ne viens pas seulement comme ami de la maison, je viens au nom et par l’ordre de l’autorité, qui, en considération de votre famille et de votre jeunesse, veut vous ménager, vous, et quelques autres jeunes gens, qui ont été pris au piège comme vous. » J’étais surpris de ne pas voir parmi les personnes qu’il me nommait celles justement avec lesquelles j’avais eu des liaisons. Les rapports ne concordaient pas, mais ils se touchaient, et je pouvais encore espérer d’épargner mes jeunes amis. Mais le brave homme était toujours plus pressant. Je ne pus nier que j’étais quelquefois rentré tard à la maison ; que j’avais su me procurer une clef ; qu’on m’avait remarqué plus d’une fois dans des lieux de plaisir avec des personnes d’humble condition et d’un extérieur suspect ; que des jeunes filles étaient mêlées à la chose ; bref, tout semblait découvert, excepté les noms. Cela m’encourageait à persévérer dans le silence.

« Ne me laissez pas partir comme cela, dit ce bon ami. La