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Cependant je continuais chez nous avec beaucoup d’ardeur mon travail de secrétaire, et par là j’eus connaissance de divers petits avis, qui arrivèrent de plusieurs côtés, et auxquels on devait avoir égard dans la capitulation nouvelle. Chaque état voulait voir ses droits garantis et sa dignité relevée dans le nouveau document. Beaucoup de ces observations et de ces vœux furent pourtant mis de côté ; beaucoup de choses restèrent comme auparavant : néanmoins les requérants reçurent les assurances les plus formelles que cela ne tournerait nullement à leur préjudice.

Le maréchal d’Empire avait toujours à s’occuper d’affaires nombreuses et importunes ; la foule des étrangers allait croissant ; il devenait toujours plus difficile de les loger. On n’était pas d’accord sur les limites des divers quartiers électoraux. Les magistrats voulaient éloigner des bourgeois les charges auxquelles ils ne semblaient pas obligés, et c’étaient jour et nuit, à toute heure, des plaintes, des recours, des débats et des querelles.

L’électeur de Mayence lit son entrée le 21 mars. On tira le canon, dont nous devions être dès lors assourdis souvent et longtemps. Cette cérémonie était une des plus importantes, car tous les personnages que nous avions vus paraître jusque-là, si éminente que fût leur position, n’étaient pourtant que des subordonnés. Mais, cette fois, paraissait un souverain, un prince indépendant, le premier après l’empereur, précédé et accompagné d’une grande escorte et digne d’un tel prince. J’aurais bien des choses à conter sur la pompe.de cette entrée, si je ne me proposais d’y revenir plus tard, à une occasion qu’on aurait de la peine à deviner. Le même jour, en effet, Lavater, qui retournait de Berlin dans son pays, passa par Francfort et vit cette solennité. Et quoique cet appareil mondain n’eût pas la moindre valeur à ses yeux, il faut bien que ce cortège, avec sa magnificence et tous ses accessoires, se fût nettement imprimé dans sa vive imagination, car, bien des années après, cet homme excellent, mais singulier, m’ayant communiqué une paraphrase poétique de l’Apocalypse, je crois, je trouvai l’entrée de l’antechrist dépeinte trait pour trait, pas à pas, détail pour détail, d’après l’entrée de l’électeur de Mayence à