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La femme courut de toutes ses forces ; Je serpent semblait attendre avec autant d’impatience que le Lis le retour des deux personnes. Malheureusement les rayons du soleil sur son déclin doraient déjà le faîte des arbres de la forêt, et des ombres allongées s’étendaient sur le lac et la prairie ; le serpent s’agitait avec impatience et le Lis fondait en larmes.

Dans cette extrémité, le serpent regardait de tous côtés ; il craignait, à chaque moment, que le soleil ne se couchât, que la corruption ne franchit le cercle magique, et n’attaquât le jeune homme irrésistiblement. Enfin il vit au haut des airs l’autour aux plumes empourprées, dont la gorge reflétait les derniers rayons du soleil. Le serpent tressaillit de joie à ce signe favorable, et il ne s’abusait point, car, bientôt après, on vit l’homme à la lampe avancer en glissant sur le lac, comme s’il venait en patins.

Le serpent ne quitta point sa position, mais le Lis se leva et s’écria :

  • Quel. bon génie t’envoie dans le moment où nous te désirons si fort, où nous avons un si pressant besoin de toi ?

—. Le génie de ma lampe m’entraîne, répondit le vieillard, et l’autour m’amène en ce lieu. Cette flamme petille quand on a besoin de moi, et je n’ai qu’à chercher un signe dans l’air : un oiseau, un météore m’indique la direction que je dois suivre. Sois tranquille, belle jeune fille. Pourrai-je te secourir, je l’ignore : un seul ne peut rien, il faut qu’il s’unisse à beaucoup d’autres dans le moment propice. Il nous faut différer et espérer.

« Tiens ton cercle fermé, poursuivit-il en se tournant vers le serpent ; puis il s’assit sur un tertre à côté de lui, et il éclaira le corps inanimé. Apportez aussi le gentil serin et placez-le dans le cercle. »

Les jeunes filles prirent le petit oiseau dans la corbeille, que la vieille avait laissée, et elles firent ce que l’homme avait dit.

Le soleil s’était couché, et, à mesure que l’obscurité augmentait, non-seulement le serpent et la lampe de l’homme commencèrent de briller à leur manière, mais le.voile du Lis répandit même une douce lumière, qui, pareille à une aurore naissante, colorait, avec une grâce infinie, ses joues pâles et son vêtement