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plutôt buissonneuses que boisées, et, de toutes parts, une vue découverte sur un sol peu accidenté.

En suivant ces sentiers, il ne tarda pas à se convaincre qu’il était dans le canton consacré h la nourriture des chevaux ; il remarquait çà et là des troupeaux, grands ou petits, de ce noble animal ; des mâles et des femelles de tout âge. Soudain l’horizon se couvre d’un effrayant nuage de poussière, qui s’enfle et s’approche rapidement, couvre toute la largeur de la plaine, puis, écarté par un coup de vent, laisse voir à découvert le tumulte qu’il avait enveloppé.

Une grande troupe de ces coursiers généreux arrive en plein galop ; ils sont conduits et maintenus en masse serrée par les gardiens qui les montent. L’orageux tourbillon passe devant le voyageur ; un beau jeune garçon, du nombre des gardiens, l’observe avec étonnement, s’arrête, saute à bas de son cheval et embrasse son père.

Aussitôt les questions et les récits commencèrent. Félix rapporta que, dans le premier temps des épreuves, il avait beaucoup souffert ; il regrettait son cheval ; il avait dû se traîner à pied par les champs et les prairies ; comme il l’avait annoncé d’avance, il ne s’était pas trop distingué dans la vie pénible et monotone des laboureurs ; la fête des moissons lui avait beaucoup plu, mais ensuite il n’avait pris aucun plaisir à bêcher, labourer, creuser la terre et la cultiver ; il s’était occupé des animaux domestiques, utiles et nécessaires, mais toujours avec nonchalance et mécontentement : enfin on l’avait fait passer dans la catégorie plus animée des cavaliers. Garder les juments et les poulains était quelquefois assez ennuyeux ; cependant lorsqu’on voyait devant soi un gentil petit animal, qui, dans trois ou quatre ans peut-être, emporterait gaiement son homme, c’était tout autre chose que de s’occuper de veaux et de cochons de lait, dont la destination, lorsqu’ils sont bien nourris et engraissés, est d’être menés à la boucherie.

La taille de l’enfant, qui allait devenir un jeune homme, son air de santé, sa conversation franche, animée et même spirituelle, étaient faits pour charmer le père. Ils se hâtèrent de suivre, à cheval, la troupe rapide, en passant devant de grandes métairies solitaires, et ils arrivèrent à la bourgade où se tenait