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dément établies, entourées de meubles gracieux, dans des salons bien chauffés et brillants comme le jour !

Cependant, puisque nous croyons surprendre la baronne au milieu d’une fête, il est nécessaire de faire observer que cette brillante illumination ne doit pas être ici considérée comme une chose extraordinaire, mais comme une des habitudes particulières que cette dame avait conservées de son premier genre de vie. Élevée à la cour, comme fille d’une grande maîtresse du palais, elle était accoutumée à préférer l’hiver à toutes les autres saisons, et à faire d’un somptueux éclairage le premier élément de toutes ses jouiSSSiîces. On ne manquait jamais de bougies, mais un des anciens serviteurs de la baronne avait un goût si prononcé pour les perfectionnements de l’industrie, qu’on n’inventait guère une nouvelle espèce de lampe, sans qu’il prit soin de l’introduire’quelque part dans le château ; l’éclairage y gagnait quelquefois en vivacilôj ; quelquefois aussi il en résultait ça et là une éclipse partielle.

L’amour et de sages réflexions avaient décidé la baronne à quitter sa position de dame d’honneur pour épouser un riche propriétaire, agronome déterminé ; et cet époux intelligent, voyant que, dans les premiers temps, la vie champêtre ne plaisait pas à sa femme, sut réparer, avec le concours de ses voisins, et sur les ordres du gouvernement, les chemins, à plusieurs milles à la ronde, si bien que les communications vicinales n’étaient nulle part aussi bien entretenues ; toutefois, dans ce louable établissement, l’objet principal avait été que Mme la baronne pût rouler partout en voiture, surtout pendant la belle saison : mais, en hiver, pour lui rendre le château plus agréable, le baron savait l’éclairer de sorte que la nuit ressemblait au jour. Après la mort de son mari, les tendres soins que la baronne prit de sa fille furent pour elle une occupation suffisante ; les fréquentes visites de son frère, une intime jouissance, et ce brillant éclairage, un agrément où elle semblait trouver une satisfaction véritable.

Cependant aujourd’hui cette illumination est fort bien à sa place, car nous voyons, dans une des chambres, comme un étalage d’étrennes, dont les yeux sont éblouis. L’adroite soubrette avait engagé le valet de chambre à éclairer mieux que