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les fraises, des espèces les plus distinguées, les poires et les pommes, excellentes et magnifiques, mais surtout une certaine espèce de petites pommes grises, dont il avait coutume de faire hommage, depuis plusieurs années, à la princesse douairière. 11 ajouta d’autres’conditions, peu importantes, mais extrêmement onéreuses pour le maître, les fermiers, les administrateurs et les jardiniers.

Au reste, le grand maréchal était de fort bonne humeur. Bien persuadé que tout finirait par s’arranger au gré de ses désirs, comme son humeur légère le lui avait représenté, il veillait à* ce que la table fût bien servie ; quelques heures d’une chasse peu fatigante lui donnaient le mouvement nécessaire ; il racontait histoires sur histoires, et avait l’air le plus joyeux du monde.

Il partit dans les mêmes dispositions ; il fit de grands remerciements au major sur sa conduite vraiment fraternelle, demanda encore quelque argent, fit soigneusement emballer les petites pommes grises, dont la récolte avait été fort belle cette année, et, muni de ce trésor, qu’il se proposait d’offrir à la princesse, comme un agréable hommage, il partit pour la résidence de Son Altesse, qui daigna lui faire le plus gracieux et le plus aimable accueil.

Le major demeurait dans une situation d’esprit bien différente, et les difficultés qu’il trouvait devant lui l’auraient, peu s’en faut, réduit au désespoir, s’il n’avait été soutenu par le sentiment qui fortifie et réjouit un homme de cœur, quand il espère démêler des affaires embrouillées et jouir de ce qu’il aura débrouillé.

Heureusement l’avocat de son frère était un honnête homme, qui, ayant beaucoup d’autres affaires, se hâta de terminer celleci. Un valet de chambre du grand maréchal ne s’employa pas moins heureusement ; il promit ses bons offices, à des conditions modérées, ce qui permit d’espérer une conclusion avantageuse. Mais, quoique charmé de la chose, le major sentit, en honnête homme qu’il était, par les divers mouvements que l’on se donna dans cette occasion, que, pour apurer une affaire, il faut bien souvent recourir à des moyens impurs.

Au reste, tout comme c’est pour les femmes un moment fort pénible que celui où leur beauté, jusqu’alors incontestée, com-