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premier ouvrage, les Brigands, qui fut représenté à Mannheim avec un grand succès. Son protecteur cependant ne s’en émerveilla pas, et lui ordonna d’en finir avec le théâtre sous peine de perdre sa protection. Sa sévérité s’étendit jusqu’à le priver quelque temps de sa liberté. L’homme qui avait écrit les Brigands devait souffrir plus que tout autre d’une telle punition ; aussi saisit-il avec empressement la première occasion de s’échapper, et dès ce moment la littérature fut sa seule ressource. Il se fixa à Mannheim, et y composa plusieurs pièces de théâtre, qui, à l’âge de vingt-quatre ans, le placèrent au premier rang des écrivains de sa patrie. C’est de cette époque (1783) que datent ses premières poésies, qui furent universellement admirées, et lui valurent une belle place auprès de Gœthe, que dans ce genre pourtant il n’effaça pas. C’est ce que ne peuvent se figurer ceux qui les lisent dans les traductions ; car, là, Schiller est plus brillant, et il reste plus de lui ; mais la grâce, la naïveté, le charme de la versification, voilà ce que les traductions ne peuvent rendre, et les imitations encore moins.

Schiller fit paraître, en 1790, son Histoire de la guerre de Trente ans, qui est un des plus beaux monuments historiques que les Allemands aient produits. En 1792, sa réputation était déjà européenne, et l’Assemblée nationale lui déféra le titre de citoyen français ; récompense alors banale, mais qui eut une heureuse influence, s’il est vrai, comme on l’a dit, qu’il composa sa tragédie de Jeanne d’Arc comme tribut de reconnaissance envers cette nouvelle patrie. Vers les derniers temps de sa vie, il publia un grand nombre de traductions, à l’exemple de Gœthe, et mourut en terminant une version littérale de Phèdre.

Il était âgé de quarante-cinq ans, et succomba à une fièvre catarrhale que ses travaux continuels avaient aggravée. On lui demanda, quelques instants avant sa mort, comment il se trouvait, il répondit :

— Toujours plus tranquille.

Et il expira.

C’était le 9 mai 1805. Sa mort causa un deuil universel,