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FROSCH.

À ma maîtresse salut et baiser ! Ce n’est pas toi qui m’en empêcheras.

Il chante.

Tire tes verrous, il est nuit ;
Tire tes verrous, l’amant veille ;
Il est tard, tire-les sans bruit.


SIEBEL.

Oui ! chante, chante, loue-la bien, vante-la bien ! j’aurai aussi mon tour de rire. Elle m’a lâché, elle t’en fera autant ! Qu’on lui donne un kobold[1] pour galant, et il pourra badiner avec elle sur le premier carrefour venu. Un vieux bouc, qui revient du Blocksberg, peut, en passant au galop, lui souhaiter une bonne nuit ; mais un brave garçon de chair et d’os est beaucoup trop bon pour une fille de cette espèce ! Je ne lui veux point d’autre salut que de voir toutes ses vitres cassées.

BRANDER frappant sur la table.

Paix là ! paix là ! écoutez-moi ! vous avouerez, messieurs, que je sais vivre : il y a des amoureux ici, et je dois, d’après les usages, leur donner pour la bonne nuit tout ce qu’il y a de mieux. Attention ! une chanson de la plus nouvelle facture ! et répétez bien fort la ronde avec moi !

Il chante.

Certain rat dans une cuisine
Avait pris place, et le frater
S’y traita si bien, que sa mine
Eût fait envie au gros Luther.
Mais un beau jour, le pauvre diable,
Empoisonné, sauta dehors,
Aussi triste, aussi misérable,
Que s’il avait l’amour au corps.


CHŒUR.

Que s’il avait l’amour au corps !

  1. Esprit familier.