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votre pauvre Caleb qui a reçu de vous tant de marques d’affection et de bonté. »

En entendant prononcer mon nom, mon vieil ami ne put se défendre d’une émotion qui se manifesta par une sorte de frémissement ; toutefois, ce mouvement fut un peu modéré par l’âge et par cette philosophie calme et bienfaisante qui formait un des traits les plus remarquables de son caractère.

« Je ne m’attendais pas à vous voir, répliqua-t-il… Je ne le désirais pas.

— Mon ami, mon meilleur, mon premier ami ! répondis-je avec un ton où l’impatience et le respect se confondaient ensemble, ne me parlez pas ainsi. Dans le monde entier, je n’ai pas un autre ami que vous. Que je trouve au moins quelque sympathie dans votre cœur ! Que j’y trouve un peu de la tendre affection que je vous porte ! Ah ! si vous saviez combien j’ai soupiré après vous pendant tout le temps de votre absence, vous ne voudriez pas me refuser ainsi de goûter sans amertume le bonheur de vous revoir.

— Eh ! si vous êtes réduit à cette déplorable situation, me dit-il d’un ton sévère, quelle en est la cause ? N’est-ce pas une conséquence inévitable de vos actions ?

— Les actions des autres et non pas des miennes ! Ah ! votre cœur doit vous dire que je suis innocent.

— Non, j’ai toujours pensé, en observant de bonne heure vos dispositions, que vous seriez un homme extraordinaire. Mais malheureusement les