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de ce même homme dont l’aspect l’avait frappée et qui semblait ne pas la perdre de vue. Cette circonstance, jointe à l’air singulier qu’elle lui trouvait, lui avait fait concevoir des inquiétudes. Cet homme n’était-il pas occupé à la suivre ? C’était le milieu du jour, et elle n’avait rien à craindre pour elle personnellement. Mais ceci ne pouvait-il pas avoir quelque rapport à moi ? Elle s’était rappelé les précautions et le mystère dont je m’enveloppais, et ne doutait pas que je n’eusse de fortes raisons pour en agir ainsi. Elle se souvenait bien d’avoir toujours été sur ses gardes à mon sujet ; mais y avait-elle été suffisamment ? Elle sentait que, si jamais elle pouvait être la cause qu’il m’arrivât un malheur, elle ne s’en consolerait de sa vie. Elle s’était donc déterminée, par manière de précaution et crainte de pis, à entrer dans la maison d’une de ses amies et à me faire parvenir un mot d’avis de ce qui lui était arrivé. Aussitôt donc qu’elle eut donné à cette amie les instructions nécessaires, elle sortit sur-le-champ pour aller faire visite à quelqu’un dans un quartier directement opposé, après avoir recommandé au messager qu’elle m’envoyait de ne partir pour faire sa commission auprès de moi que cinq minutes après elle. Par cette conduite prudente, elle me tira du danger qui me menaçait alors.


Cependant l’avertissement qui me fut apporté ne me donna nullement à connaître toute la grandeur du péril que j’avais à redouter. Pour tout ce que je