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Premier Péché

Et la route à l’église ? Que de fois fermant les yeux, il avait refait ce trajet, il entendait encore le son des cloches, il la sentait toujours à son bras ; toutes ces pensées d’antan revenaient. Aussi ce rêve qui l’avait distrait pendant la messe… d’aller s’agenouiller, juste au pied de la Crèche où Jésus, sur sa paille, souriait divinement. Il leur aurait souri… et la vie nouvelle aurait commencé…

C’est encore Noël, et dans la chambre solitaire, le soir de la minuit, il pense à l’oublieuse, pour se rappeler la belle heure de jadis. Ce n’est pas encore elle qu’il regrette, le pauvre rêveur, c’est la douceur unique laissée dans sa vie, par un souvenir… C’est le charme idéal de la vision ancienne, et s’il y pense encore c’est pour y retrouver de la joie.

Combien de solitaires, perdus, isolés dans cette nuit de Noël, attendent le chant des cloches. Ce sont des heures où, pour ne pas pleurer le présent, il faut vivre de son passé. An par an, revivre sa vie, depuis les petits bas pendus au pied du lit, jusqu’à… tant de joies perdues, tant de tristesses mortes, — et la mélancolie nous revient d’elles, comme ce parfum à peine subtil s’échappant de la boîte aux souvenirs. On parcourt tout ce petit roman vécu de soi, on feuillette les pages closes, pour marquer les unes d’un baiser, et donner aux autres, la caresse des larmes. Que le volume est mince, une heure, et tout est lu… Pourtant !