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coiffé d’un casque de nègre. Général, que pensez-vous de la Honte Noire ?

Cette fois je traduisis :

— Toute occupation étrangère, répondit Ludendorff, d’une voix de phonographe et sa pensée complètement absente, qu’elle soit blanche ou qu’elle soit noire, est une honte pour le pays occupé.

Dans sa distraction, au lieu de dire « blanche » il avait d’ailleurs dit « verte ».

Je me tournai vers M. Grane, qui sténographia :

— M. Grane, nous dit le général, vous comprenez mieux que moi, puisque vous êtes Américain, la folie des Français. Ce peuple pousse la marotte de l’égalité jusqu’au délire. Il n’a vraiment pas cru insulter l’Allemagne en relevant par ses noirs nos garnisons de hussards de la mort ou de cuirassiers blancs. Les régiments nègres sont réclamés par les villes françaises. Pour moi, Ludendorff, qui suis aussi franc et loyal, je dois avouer que l’occupation noire nous a donné en quatre ans onze fois moins de métis que l’exposition de Togo à Berlin pendant l’été de 1906.

— Trois dernières petites questions au général, dit M. Grane. D’abord, quelle est son opinion sur la France. Je lui demanderai ensuite s’il est vrai qu’il faisait tout, et le maréchal Hindenburg rien ; et s’il est exact qu’il laissait deux ou trois jours, pendant les batailles, l’empereur Guillaume sans nouvelles.

Le général ayant dû comprendre le mot France, je lui demandai s’il avait jadis voyagé en France, s’il comptait rester en Bavière, toutes ces questions en somme qu’on pose à ceux qui ont eu une bonne maladie. Il me savait gré de ces curiosités modestes. Il