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LE FAIBLE BERNARD IQT

Elle ressemblait au Saint Sébastien de ce pein- tre allemand. A qui ressemblait-elle donc?

— • Embrassez-moi...

Elle l'embrassa,

— Embrassez-moi en laissant vos lèvres un peu ouvertes.

Toujours sereine, elle se prêta à son jeu. Ainsi les miroirs où des mots délicieux sont cachés vous les révèlent quand vous soufflez sur eux, vous les révèlent sans émoi. Avec tranquillité et conscience, elle acceptait les baisers, les moindres regards. Ils étaient en sûreté en elle comme dans une tirelire.

Ils s'asseyaient maintenant au bord de la source des Préférés. Ils la contemplaient. Du centre partaient d'innombrables petits cer- cles, immobiles et tendus. A compter son âge comme on compte celui des arbres, c'était une source qui devait avoir plus de mille ans. On sentait qu'un mouvement infini circulait dans l'espace. Mais, comme une file de billes d'ivoire, les choses se le transmettaient en restant immobiles. Seul, tout là-bas, un peu- plier secouait ses feuilles, seule, si près. Re- née frissonnait quand c'était son tour- Jamais

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