Page:Giraudoux - Adorable Clio.djvu/191

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quand le soleil disparaît à nouveau, quand la pluie retombe, s’acharne, la même dont on reconnaît les gouttes ; — alors je pense à lui, Seeger, qui aimait les orages, et je frémis…

— Comment est mort Seeger ? demande Rogers.

Dans un mois Rogers part pour la guerre, et il ne perd pas une occasion de savoir comment les poètes, ses collègues, y sont tués. Il serait bien étrange que deux poètes fussent tués de la même façon, de la même exacte façon, et chacune de leurs morts est une mort qu’il n’aura pas. Il ne divaguera pas, comme Brooke, disant au hasard mille prénoms, et mourant au premier nom de femme. Il n’aura pas le temps, comme Dollero, de m’écrire trois billets, le premier avec une brindille et son sang, me disant adieu pour toujours, le second avec le crayon de l’infirmier, espérant me voir, le dernier avec le stylo du major, confiant, heureux… inachevé. Il ne tombera pas mort, comme Hesslin, le poète allemand, sur le dos d’un