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Dans sa profonde paix s’endormait la nature.
Au vent qui défaillait nous voguions lentement.
Quand le souffle apaisé sur les eaux sans murmure,
Au détour d’un îlot tomba complètement.

Alors les exilés du vaste firmament
Sur un rythme si doux agitèrent leurs ailes,
Que les soupirs de l’air à peine en ont frémi.

Comme au soleil touchant les sveltes hirondelles
Effleurent le miroir d’un beau lac endormi,
Ainsi le « Goéland » fila sur l’eau profonde
En rayant d’un long trait, la surface de l’onde.

Bientôt, se profilant sur l’astrale splendeur,
Deux falaises à pic dressèrent leur grandeur
Au seuil de l’Inconnu ; sentinelles sublimes
Elles veillaient le fleuve et dominaient les cimes.

Le fraternel Silence et l’Oubli bienveillant
Guidèrent le canot vers les deux promontoires ;
À peine entrions-nous à l’ombre de ces gloires,
Que la trop courte nuit pâlit à l’Orient.

Les célestes esprits comme elle s’envolèrent ;
Pendant quelques instants au zénith ils planèrent,
Puis vers un autre monde ils prirent leur essor.

Ainsi j’ai remonté le fleuve de la Mort.