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Je revis le Sauvage inventif, assemblant
L’écorce d’où son art tirait le « Goéland » ;
Comme un sculpteur épris d’un chef-d’œuvre qu’il crée,
Il flattait du regard la carène cambrée,
Calculait telle courbe à la largeur des bords
Et des proportions ménageait les rapports.
Je me remémorai sa parole prudente
Au temps déjà lointain où j’allais sous la tente
Causer des vieux chasseurs et voir de jour en jour
L’écorce prendre forme en son svelte contour ;
Quand je lui demandai pour la proue ou la poupe
Un ornement futile et d’élégante coupe,
Comme ceux que j’avais au jardin admirés
Sur des petits canots de guirlandes parés,
— Le vent, avait-il dit, prendrait dans ces girouettes !
Tu remercieras Paul au milieu des tempêtes,
Quand tu traverseras où d’autres sombreront !

Cependant, j’approchais du Saguenay sans fond ;
Mon aviron heurta la Pointe aux Alouettes.
Je ne distinguais rien des grandes silhouettes,
Mais un phare apparut à mon regard chercheur :
Le brasier qui flambait au foyer d’un pêcheur
Guida ma randonnée, et j’atteignis la plage
De la petite baie, au pied du vieux village.