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Or la participation aux bénéfices est un mode de rémunération du travail qui a précisément pour but de remédier à ces graves inconvénients en transformant le salarié en une sorte d’associé du patron. Le profit, au lieu d’appartenir exclusivement à celui-ci, est partagé, suivant certaines proportions, entre le patron et les ouvriers.

Cette institution a été pratiquée de temps immémorial chez les pêcheurs, mais c’est en France qu’elle paraît avoir été établie pour la première fois dans l’industrie, en 1842, par un peintre en bâtiment, Leclaire, avec un succès qui n’a pas été égalé depuis et qui s’explique par certaines conditions particulières de cette industrie. Aujourd’hui, bien que cette institution n’ait pas pris le développement qu’on pouvait espérer, cependant elle est pratiquée par plusieurs centaines de maisons réparties dans le monde entier[1].

Elle est susceptible de revêtir et revêt en fait les formes tes plus variées, depuis la simple gratification jusqu’à l’association proprement dite. Et sa quotité aussi varie considérablement, étant nécessairement d’autant plus réduite que le rôle de la main-d’œuvre dans l’entreprise est moindre et celui du capital plus considérable. Mais sa forme normale est celle d’un tant pour cent sur les profits, déterminé par avance


    ce qu’il appelait le principe pratique suprême, est celui-ci : Se souvenir en toute occasion que nous devons considérer la personne de notre prochain comme une fin et non comme un moyen. Évidemment l’organisation actuelle du travail, celle où les ouvriers au service d’un entrepreneur sont un moyen pour lui de faire fortune, ne réalise guère cette haute maxime.

  1. L’almanach de la Coopération française pour 1898 compte 315 de ces maisons dont : 125 en France, 80 en Angleterre, 37 aux États-Unis, 25 en Allemagne, 17 en Suisse, 8 en Italie, 7 en Hollande, 4 en Belgique ; les 12 restant sont réparties entre tous les autres pays d’Europe. Mais ces chiffres sont inférieurs à la réalité, car pour l’Angleterre, par exemple, le rapport du Board of Trade de 1897 en relève 94. En tout cas, il faudrait y ajouter plusieurs centaines de sociétés coopératives qui mettent en pratique cette institution.
    Les parts accordées aux ouvriers peuvent être calculées, soit d’après les bénéfices réalisés, soit d’après les quantités produites, soit même d’après les économies obtenues sur la matière première (par exemple, les Compagnies de chemin de fer allouent à leurs mécaniciens des primes calculées d’après les économies qu’ils auront réussi à faire sur le charbon).