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elles ne seraient plus des institutions de crédit. Si l’on veut user du crédit, il faut en subir les inconvénients. C’est poursuivre la quadrature du cercle que de vouloir réunir à la fois les avantages de crédit et ceux du comptant l’un exclut l’autre.


Faut-il donc, puisque toute réglementation parait inefficace, si même elle n’est pas gênante ou dangereuse, adopter le principe du laisser-faire et permettre aux banques de faire rémission à leur guise et sans contrôle ?

Bon nombre d’économistes, surtout ceux de l’école libérale, soutiennent en effet la liberté des banques, et les raisons qu’ils en donnent ne sont pas sans force.

L’argument topique c’est qu’il n’y aurait jamais lieu de redouter une émission exagérée de billets. Le danger est chimérique, dit-on : le simple jeu des lois économiques restreindra cette émission dans de justes limites, alors même que les banques voudraient les dépasser. Voici pourquoi :

1° D’abord les billets de banque ne sont émis qu’au cours d’opérations de banque, c’est-à-dire par des escomptes ou des avances sur titres. Il ne suffit donc pas, pour qu’un billet de banque pénètre dans la circulation, que la banque veuille l’y faire entrer : encore faut-il qu’il y ait quelqu’un disposé à l’emprunter. Ce sont donc les besoins du public et nullement les désirs de la banque qui règlent l’émission. La quantité de billets qu’elle émettra dépendra du nombre des effets qu’on présentera à l’escompte, et la quantité de ces effets eux-mêmes dépendra du mouvement des affaires.

2° Ensuite les billets de banque n’entrent dans la circulation que pour peu de temps : quelques semaines après être sortis, ils reviennent à la banque. Voici en effet un billet de mille francs qui sort en échange d’une lettre de change : mais dans quelques semaines, dans 90 jours au plus tard, quand la banque fera toucher cette lettre de change, le billet de mille francs lui reviendra. Ce ne sera pas le même, mais qu’importe ? Autant il en sort, autant il en rentre.

Le flux les apporta ; le reflux les remporte.