un orgueil qui m’avait emporté loin de vous. Guidez mon choix. Je me soumets, vous dis-je. Je soumettrai de même mes enfants ; et ma tentative ainsi ne me paraîtra plus si vaine.
— Écoute ; il est à présent un enfant dont tu pourrais déjà t’occuper.
— Que voulez-vous dire, et de qui parlez-vous ?
— De ton frère cadet, qui n’avait pas dix ans quand tu partis, que tu n’as reconnu qu’à peine, et qui pourtant…
— Achevez, mère ; de quoi vous inquiéter, à présent ?
— En qui pourtant tu aurais pu te reconnaître, car il est tout pareil à ce que tu étais en partant.
— Pareil à moi ?
— À celui que tu étais, te dis-je, non encore hélas ! à celui que tu es devenu.
— Qu’il deviendra.
— Qu’il faut le faire aussitôt devenir. Parle-lui ; sans doute il t’écoutera, toi, prodigue. Dis-lui bien quel déboire était sur la route ; épargne-lui…
— Mais qu’est-ce qui vous fait vous alarmer ainsi sur mon frère ? Peut-être simplement un rapport de traits…
— Non, non ; la ressemblance entre vous deux est plus profonde. Je m’inquiète à présent pour lui de ce qui ne m’inquiétait d’abord pas assez pour toi-même. Il lit trop, et ne préfère pas toujours les bons livres.
— N’est-ce donc que cela ?
— Il est souvent juché sur le plus haut point du jardin, d’où l’on peut voir le pays, tu sais, par-dessus les murs.