Page:Gide - La Porte étroite, 1909.djvu/54

Cette page a été validée par deux contributeurs.
52
la porte étroite

tant subitement ; — mais je m’occuperai du ménage… et enfin ni toi, ni ton oncle, ni Alissa n’aurez à vous sentir gênés.


Ma tante Félicie s’abusait sur l’efficacité de sa présence. À vrai dire nous ne fûmes gênés que par elle. Ainsi qu’elle l’avait annoncé, elle s’installa, dès juillet, à Fongueusemare, où Miss Ashburton et moi ne tardâmes pas à la rejoindre. Sous prétexte d’aider Alissa dans les soins de la maison, elle emplissait cette maison si tranquille d’une rumeur continue. L’empressement qu’elle mettait à nous être agréable et, comme elle disait, à « faciliter les choses », était si épais que nous restions le plus souvent, Alissa et moi, contraints et quasi muets devant elle. Elle dut nous trouver bien froids… — Et quand nous ne nous serions pas tus, aurait-elle pu comprendre la nature de notre amour ? — Le caractère de Juliette, par contre, s’accommodait assez de cette exubérance ; et peut-être quelque ressentiment gênait-il mon af-