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la porte étroite

— Est-ce que tu crois qu’il deviendra quelqu’un de remarquable ?

Ici la voix de l’oncle se haussa :

— Mais, mon enfant, je voudrais d’abord savoir ce que tu entends par ce mot : remarquable ! mais on peut être très remarquable sans qu’il y paraisse, du moins aux yeux des hommes… très remarquable aux yeux de Dieu.

— C’est bien ainsi que je l’entends, dit Alissa.

— Et puis… est-ce qu’on peut savoir ? il est trop jeune… Oui, certainement, il promet beaucoup ; mais cela ne suffit pas pour réussir…

— Qu’est-ce qu’il faut encore ?

— Mais, mon enfant, que veux-tu que je te dise ? Il faut de la confiance, du soutien, de l’amour…

— Qu’appelles-tu du soutien ? interrompit Alissa.

— L’affection et l’estime qui m’ont manqué, répondit tristement mon oncle ; puis leur voix définitivement se perdit.