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la porte étroite

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jours avant Noël. Depuis mon retour du service, j’habitais avec elle de nouveau ; je ne la quittais guère, et pus assister à ses derniers instants. Une carte d’Alissa me témoigna qu’elle prenait à cœur notre vœu de silence plus encore que mon deuil : elle viendrait entre deux trains, seulement pour l’inhumation à laquelle mon oncle ne pourrait assister.

Nous fûmes presque seuls, elle et moi, à la funèbre cérémonie, puis à suivre la bière ; marchant à côté l’un de l’autre, à peine échangeâmes-nous quelques phrases ; mais, à l’église où elle s’était assise auprès de moi, je sentis à plusieurs reprises son regard se poser sur moi tendrement.

— C’est bien convenu, me dit-elle, sur le moment de me quitter : rien avant Pâques.

— Oui ; mais à Pâques…

— Je t’attends.

Nous étions à la porte du cimetière. Je proposai de la reconduire à la gare ; mais elle fit signe à une voiture et sans un mot d’adieu me laissa.