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la porte étroite

ici. Si je ne parviens pas à revoir Jérôme avant son départ, dis-lui, chère tante, que je lui écrirai… »

La consigne ne visait que moi. Libre à ma tante, libre à tout autre de sonner chez les Bucolin ; et ma tante comptait y aller ce matin même. Le bruit que je pouvais faire ? Quel médiocre prétexte… N’importe !

— C’est bien. Je n’irai pas.

Il m’en coûtait beaucoup de ne pas revoir aussitôt Alissa ; mais pourtant je craignais ce revoir ; je craignais qu’elle ne me tînt pour responsable de l’état de sa sœur, et supportais plus aisément de ne pas la revoir que de la revoir irritée.

Du moins voulus-je revoir Abel.

À sa porte, une bonne me remit un billet :

« Je laisse ce mot pour que tu ne t’inquiètes pas. Rester au Havre, si près de Juliette, m’était intolérable. Je me suis embarqué pour Southamp-