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comme une chose indigne d’un empereur de persécuter les adorateurs du Christ et les citoyens de Rome. L’Hénoticon obtint surtout l’approbation des Égyptiens ; cependant l’œil inquiet et même prévenu de nos théologiens orthodoxes n’y a pas aperçu la plus petite tache ; on y expose d’une manière très-exacte la doctrine catholique sur l’incarnation, sans adopter ou sans rejeter les termes particuliers ou les opinions des sectes ennemies. On y prononce un anathème solennel contre Nestorius et Eutychès, contre tous les hérétiques qui divisent ou confondent le Christ, ou qui le réduisent à un vain fantôme. Sans déterminer si le mot nature doit être employé au singulier ou au pluriel, on y confirme respectueusement le système de S. Cyrille, la doctrine des conciles de Nicée, de Constantinople et d’Éphèse ; mais au lieu de se prosterner devant les décrets du quatrième concile général, on élude ce point en réprouvant toutes les doctrines contraires, s’il en est qui aient été enseignées, soit à Chalcédoine, soit ailleurs. Cette expression équivoque pouvait réunir, par un accord tacite, les amis et les ennemis du concile de Chalcédoine. Les plus raisonnables d’entre les chrétiens approuvèrent cette mesure de tolérance, mais leur raison était faible et inconstante ; et le zèle véhément des différens partis ne vit dans cette soumission qu’une timidité servile. Il était difficile de garder une neutralité exacte sur un sujet qui absorbait les pensées et les discours des hommes ; un livre, un sermon, une prière, rallumaient le feu de la