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par une mâle contenance, par une stature élevée, des muscles d’athlète, l’air et le maintien d’un soldat. Il conserva sa vigueur et sa santé jusqu’à un âge très-avancé, et ce fut le fruit de la tempérance et de ses exercices. Un morceau de pain et un verre d’eau formaient souvent son repas du soir, ou s’il goûtait d’un sanglier ou d’un chevreuil apprêté de ses propres mains, ce n’était que lorsqu’il l’avait gagné par une chasse fatigante. Habile dans le maniement des armes, il ne connaissait point la peur ; son éloquence persuasive savait se plier à tous les événemens et à toutes les positions de la vie ; il avait formé son style, mais non pas sa conduite, sur le modèle de saint Paul : dans toute action criminelle il ne manquait jamais de courage pour se résoudre, d’habileté pour se conduire, de force pour exécuter. Après la mort de l’empereur Jean, il suivit la retraite de l’armée romaine. En traversant l’Asie Mineure, comme il errait, par hasard ou à dessein, dans les montagnes, les chasseurs turcs l’environnèrent, et il demeura quelque temps, soit de son plein gré, soit malgré lui, au pouvoir de leur prince. Ses vertus et ses vices lui procurèrent la faveur de son cousin : il partagea les dangers et les plaisirs de Manuel ; et tandis que l’empereur vivait dans un commerce incestueux avec Théodora, Andronic jouissait des bonnes grâces d’Eudoxie, sœur de cette princesse, qu’il avait séduite. Celle-ci, bravant les bienséances de son sexe et de son rang, se glorifiait du nom de la concubine d’Andronic, et le palais ou le camp auraient également pu attester