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mutilait ses domestiques de sa main royale ; son surnom de Copronyme lui venait de ce qu’il avait souillé les fonts baptismaux ; son âge, à la vérité, pouvait lui servir d’excuse ; mais les plaisirs de sa virilité le rabaissèrent au-dessous du niveau de la brute ; il confondit dans ses débauches tous les sexes et toutes les espèces, et sembla tirer quelque plaisir des objets les plus faits pour révolter les sens ; l’iconoclaste fut hérétique, juif, mahométan, païen, athée ; et ses cérémonies magiques, les victimes humaines qu’il immola, ses sacrifices nocturnes à Vénus et aux démons de l’antiquité, sont les seules preuves que nous ayons de sa croyance en Dieu ; sa vie fut souillée des vices les plus contradictoires, et enfin les ulcères qui couvrirent son corps, anticipèrent pour lui les tourmens de l’enfer. L’absurdité d’une partie de ces accusations, que j’ai eu la patience de copier, se réfute d’elle-même ; et, dans tout ce qui regarde les anecdotes privées de la vie des princes, rien n’est plus aisé que le mensonge, rien n’est plus difficile que de le repousser. Je n’adopte point la pernicieuse maxime, que celui à qui on reproche beaucoup est nécessairement coupable de quelque chose ; cependant je puis clairement démêler que Constantin V fut dissolu et cruel. Le propre de la calomnie est d’exagérer plutôt que d’inventer ; et sa langue audacieuse est contenue, à quelques égards, par la notoriété établie dans le siècle et dans le pays dont elle invoque le témoignage. On désigne le nombre des évêques, des moines et des généraux victimes de sa cruauté ; leurs noms étaient