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les naturels à un nouveau baptême et à une nouvelle ordination ; ils frémirent d’horreur en voyant un prêtre étranger arracher de leurs tombeaux les plus saints d’entre leurs morts, et excommunier les plus illustres d’entre les vivans. Les Abyssins s’armèrent pour défendre leur religion et leur liberté ; ils montrèrent une valeur désespérée, mais infructueuse. Cinq rebellions furent étouffées dans le sang des rebelles ; deux abunas furent tués dans les combats ; des légions entières furent massacrées sur le champ de bataille ou étouffées dans leurs cavernes ; et le mérite, le rang et le sexe ne purent soustraire les ennemis de Rome à une mort ignominieuse ; mais le monarque vainqueur se laissa vaincre à la fin par la constance de sa nation, par celle de sa mère, de son fils et de ses plus fidèles amis. Segued écouta la voix de la pitié, de la raison, peut-être de la crainte, et l’édit par lequel il accordait la liberté de conscience, révéla à la fois la tyrannie et la faiblesse des jésuites. Basilides, après la mort de son père, chassa le patriarche latin, et rendit aux vœux de la nation la foi et la discipline de l’Égypte. [Expulsion finale des jésuites. A. D. 1632.]Les Églises monophysites répétèrent en triomphe, « que le troupeau de l’Éthiopie était enfin délivré des hyènes de l’Occident ; » et les portes de ce royaume solitaire furent à jamais fermées aux arts, aux sciences et au fanatisme de l’Europe[1].

  1. Les trois historiens protestans, Ludolphe (Hist. Aeth., Francfort, 1681 ; Commentarius, 1691 ; Relatio nova, etc.,