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sollicitèrent un renfort de troupes européennes. Après quarante années de patience et de dextérité, on leur prêta une oreille plus favorable, et deux empereurs d’Abyssinie se laissèrent persuader que Rome pouvait faire en ce monde et en l’autre le bonheur de ses adhérens. Le premier de ces néophytes rois perdit la couronne et la vie, et l’armée rebelle fut sanctifiée par l’abuna, qui chargea l’apostat d’anathèmes, et délia ses sujets de leur serment de fidélité. Zadengher fut vengé par le courage et la fortune de Susnée, qui monta sur le trône avec le nom de Segued, et qui suivit avec plus de vigueur la dévote entreprise de son parent. L’empereur, après s’être donné le plaisir d’une lutte d’argumentation entre les jésuites et ses prêtres mal habiles, se déclara prosélyte du concile de Chalcédoine, croyant que son clergé et son peuple embrasseraient sans délai la religion de leur prince. Bientôt après il ordonna, sous peine de mort, de croire aux deux natures de Jésus-Christ ; il enjoignit aux Abyssins de se livrer le jour du sabbat au travail ou aux plaisirs ; et Segued, à la face de l’Europe et de l’Afrique, renonça à ses rapports avec l’Église d’Alexandrie. [Conversion de l’empereur. A. D. 1626.]Un jésuite, Alphonse Mendez, patriarche catholique de l’Éthiopie, reçut au nom d’Urbain VIII l’hommage et l’abju-

    ab ipsis editis suffulciebatur, est l’assertion non contredite du dévot empereur Susnée, à Mendez son patriarche (Ludolphe, Comment., no 126, p. 529), et on doit conserver précieusement de pareilles assertions comme un antidote contre toutes les légendes merveilleuses.