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arbitraire des richesses de l’Afrique[1]. L’augmentation des impôts destinés à enrichir un souverain éloigné du pays, la restitution forcée de toutes les terres qui avaient appartenu à la couronne, ne tardèrent pas à dissiper l’ivresse de la joie publique ; mais l’empereur se montra insensible aux plaintes modestes du peuple, jusqu’au moment où les clameurs des soldats mécontens vinrent le tirer de son sommeil et de sa sécurité. Un grand nombre d’entre eux avaient épousé des veuves et des filles de Vandales ; ils réclamaient comme doublement à eux, à titre de conquête et de propriété, les domaines que Genseric avait assignés à ses troupes victorieuses. Ils n’écoutèrent qu’avec dédain les représentations froides et intéressées de leurs officiers, qui leur représentèrent vainement que la libéralité de Justinien les avait tirés de l’état sauvage ou d’une condition servile ; qu’ils s’étaient enrichis des dépouilles de l’Afrique, des trésors, des esclaves et du mobilier des Barbares vaincus,

  1. Procope est mon seul guide sur les troubles de l’Afrique, et je n’en désire pas d’autre. Il fut témoin oculaire des événemens mémorables de son temps, ou en recueillit avec soin les différens récits. Il raconte dans le second livre de la guerre des Vandales, la révolte de Stoza (c. 14-24), le retour de Bélisaire (c. 15), la victoire de Germanus (c. 16, 17, 18), la seconde administration de Salomon (c. 19, 20, 21), le gouvernement de Sergius (c. 22, 23), d’Areobindus (c. 24), la tyrannie et la mort de Gontharis (c. 25, 26, 27, 28) ; et je n’aperçois dans ses différens portraits aucun symptôme de flatterie ou de malveillance.